’’Les comètes de Sô Ava’’, un ouvrage écrit par l’ingénieur-biologiste-psychologue béninoise, Eugénie Dossa Quenum, se veut un plaidoyer fort pour une prise en charge obligatoire de la scolarisation de filles par l’Etat.
L’ouvrage est écrit en 2017 sous forme de nouvelles, par cette Béninoise résidant en France, reconnue pour son combat permanent pour la scolarisation de filles. Elle était récemment à Dakar pour faire la promotion de son livre dans les écoles sénégalaises par le biais de l’Institut national d’étude et d’action pour le développement de l’éducation (INEADE).
Dans cette production, Eugénie Dossa Quenum revient de façon romancée sur un drame survenu en 2015 dans le village lacustre de Sô Avo au Bénéin, où le premier triplé de bachelières dudit village a sombré le jour même de leur admission au bac, dans le lac Nokoué.
Cette histoire est celle d’Alowonou, Sonagnon et Yanagbo, trois élèves évoluant dans un milieu réfractaire à l’apprentissage des filles ont su malgré tout, s’imposer, non sans difficultés, avec bravoure et détermination, jusqu’à obtenir le bac avec la mention.
Malheureusement, à leur retour au centre d’examen, elles sont mortes noyées dans le fleuve Sô. Un vent qui s’était levé au moment de la traversée a fait retourner leur barque, faisant engloutir tous les occupants par les flots.
Dans un style d’écriture à la fois poétique et très digeste cette écrivaine, également membre de Médecins du Monde, a abordé avec l’APS ce sinistre fait divers qui s’est déroulé dans son pays, tout en attirant l’attention des autorités sur les nombreuses difficultés auxquelles sont confrontées au quotidien, ces jeunes filles vivant dans ces contrées enclavées.
’’Ce qui est plus dramatique dans cette histoire est que ce malheur a été traité comme un banal fait divers, alors que dans d’autres pays, les trois filles, premières bachelières de leur village et ayant péri dans le fleuve après les résultats, auraient fait l’objet d’un grand tapage médiatique’’, a ainsi déploré Eugénie Dossa Quenum, lors d’un entretien accordé à l’APS.
Selon cette militante engagée de la Ligue Internationale de Femmes pour la Paix et la Liberté, cette histoire démontre à suffisance que les gens ne sont pas traités de manière similaires, selon qu’ils soient citadins ou villageois de localités éloignées, aussi bien par les médias que par les autorités publiques.
’’Donc c’est un peu la réhabilitation de ces filles que je fais à travers filles : Alowonou, Sonagnon et Yanagbo’’, a fait savoir Eugénie Dossa Quenum.
Ces ‘’comètes de Sô Ava qui se sont éteintes à la fleur de l’âge, a-t-elle dit, rêvaient de devenir respectivement, une fois leurs études supérieurs poussées le plus loin possible, de devenir présidente de la Cour suprême du Bénin, directrice de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et Directrice du Fonds monétaire international (FMI)’’.
’’Evidemment, certaines personnes non favorables à l’éducation des filles ont voulu interpréter cet accident comme une sanction des ancêtres. Mais contrairement à ce qui était redouté par beaucoup, cet évènement a été plutôt une motivation supplémentaire pour les autres filles de ces villages (…) qui ont vu en ces trois comètes de véritables modèles à suivre’’, dit-elle.
Situé dans le sud-est du Bénin, la cité lacustre de Sô Ava est connue pour être le lieu où le taux de déscolarisation des filles est le plus élevé par rapport à la moyenne nationale.
Pour cause, à Sô Ava, très tôt, ’’les filles subissent le poids de la tradition avec les mariages précoces qui interviennent très souvent à douze ans, ainsi que d’autres normes sociales et culturelles de soumission’’, explique Eugénie Dossa Quenum.
S’y ajoute que celles qui ont le privilège d’aller à l’école sont obligées de faire, deux fois dans la journée, la traversée du fleuve en pirogue, pour regagner leurs établissements situés sur la terre ferme.
A travers, ’’Les comètes de Sô Ava’’, l’ingénieur-biologiste-psychologue béninoise, Eugénie Dossa Quenum, plaide pour une prise en charge obligatoire de la scolarisation de filles par l’Etat
Face à toutes ces pesanteurs sociales qui empêchent les jeunes filles d’aller jusqu’au bout de leur cursus scolaire et universitaires, l’Etat doit assurer la prise en charge ’’obligatoire et gratuite’’ de leur scolarisation, estime l’auteur.
En attendant ces réformes macro, elle espère de la vente de ce livre, ouvrir au profit de ces dernières, un internat pouvant accueillir dans en premier temps, au moins, une cinquantaine d’élèves.
Eugénie Dossa Quenum explique qu’elle est en train de faire ’’les démarches nécessaires pour que ce livre déjà contenu dans des tablettes scolaires distribué à certaines écoles de la place comme celle de Derklé à Dakar soit publié par les Nouvelles éditions africaines du Sénégal (NEAS)’’.
’’Et si le livre est accepté, il sera édité ici à Dakar et vendu au prix symbolique de deux-mille de francs pour qu’il soit abordable pour tous’’, soutient-elle.