Sénégal : s’adapter à la chute de la production de riz pluvial

Au Sénégal, la production de riz pluvial pourrait diminuer de 50% d’ici 2100. Cette annonce qui découle d’une étude du Cirad et de l’Isra appelle le pays de la Téranga à trouver des techniques pour contourner la crise du riz.

La production de riz pluvial diminuerait de moitié au Sénégal dans les soixante prochaines années. Les prévisions émanent d’une étude menée conjointement par au moins deux institutions. Il s’agit du Centre de coopération internationale en Recherche agronomique pour le développement (Cirad) et de l’Institut sénégalais de recherche agricole (Isra).

Cette diminution de 50% des rendement ne sont pas sans conséquence sur le pays. En effet, le riz est la principale céréale consommée au Sénégal. Il occupe le premier rang devant le mil et le maïs. La consommation moyenne du riz pluvial est de 12Kg sur 70Kg par an. Tandis que les besoins en consommation tournent autour de 1,7 à 1,8 millions de tonnes de riz blanc, l’offre locale ne parvient à couvrir que 35% de la demande. L’importation de l’Asie vient couvrir le reste de la demande.

Dans ce contexte, il est urgent de développer les techniques pour contourner la menace. L’étude propose une adaptation de variétés de riz, avec la culture des variétés plus résistantes à la chaleur et nécessitant moins d’eau.

La raison en est que dans les prochaines décennies, il sera « impossible de cultiver du riz pluvial au Sénégal dans les zones où il est actuellement cultivé », relève l’agronome Edward Gérardeaux. A côté de cela, l’augmentation de la production du maïs, du sorgho ou du mil pourrait contribuer à résoudre le creux en cas de chute de la production.

Des experts échangent sur le bilan Carbonne des écosystèmes agrosylvopastoraux sahéliens

La réunion annuelle internationale du projet de recherche-action visant à évaluer le bilan Carbonne des écosystèmes agrosylvopastoraux sahélien s’est ouverte mardi, à Dakar, avec la participation de plusieurs experts, a constaté l’APS.

Le projet dénommé ‘’séquestration de Carbonne et émission de gaz à effet de serre dans les écosystèmes (agro) sylvopastoraux dans les Etats sahéliens du CILSS (CASSECS)’’ est financé par l’Union européenne (UE) pour un montant de 5 millions d’euros et couvre le Sénégal, le Niger et le Burkina Faso.

Lancé en janvier 2020, pour une durée de quatre ans, ce projet est porté par l’Institut sénégalais de recherches agricoles du Sénégal (ISRA).

‘’Au Sahel, l’Elevage pastoral valorise un milieu extrême. Alors qu’il est accusé d’émettre trop de gaz à effet de serre par kilogramme de lait ou de viande produit, une recherche menée au Sénégal montre que les territoires pastoraux peuvent en réalité avoir un bilan Carbonne neutre : les émissions sont composées par la séquestration de carbone dans les sols et la végétation’’, a déclaré le directeur général de l’ISRA, Momar Talla Seck, à l’ouverture de la rencontre.

‘’L’avis le mieux partagé est que les changements climatiques observés depuis ces dernières décennies à l’échelle planétaire, corrélés à une augmentation exponentielle de l’émission anthropique des gaz à effet de serre, fragilisent considérablement l’équilibre des systèmes pastoraux sur lesquels des millions de personnes dépendent pour leur survie’’, a-t-il ajouté.

Pour sa part, le Conseil technique numéro 1 du ministère de l’Agriculture et de l’équipement rural, Younoussa Mballo, a magnifié le travail déjà abattu par le projet.

‘’Des progrès remarquables ont été noté depuis le démarrage effectif du projet. Il s’agit entre autres de l’obtention d’outils et protocoles de manipulation, de la production de données ainsi que la réalisation d’une série d’essais’’, a-t-il expliqué.

‘’Des avancées sont aussi notées dans l’amélioration du dispositif de bilan à l’échelle nationale, la co-conception et la diffusion d’options d’atténuation de l’impact de l’Elevage sur le changement climatique, la formation et le renforcement des compétences sur l’évaluation de l’impact environnemental des systèmes d’Elevage’’, a-t-il ajouté.

De son côté, le directeur de l’Elevage, Docteur Dame Sow, a estimé que les résultats des recherches du projet ‘’pourraient apporter des réponses concluantes face aux questions d’atténuation des gaz à effet de serre, mais aussi d’adaptation aux changements climatiques pour les pasteurs dans un contexte où les ressources sur lesquels reposent le maintien de leurs activités sont menacées’’.

Il a félicité l’ensemble des partenaires impliqués dans cette initiative avant de les encourager à poursuivre ce chantier qui, selon lui, ‘’produira des enseignements dont nous pourrons tout un chacun tirer profit’’.

Les travailleurs de l’ISRA réclament une sécurisation des salaires et une hausse budgétaire

 L’intersyndicale des travailleurs de l’Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA) déclare avoir adressé une lettre au président de la République pour réclamer la hausse du budget alloué à l’organisme de recherche et la sécurisation des salaires de ses employés.
Elle affirme avoir pris cette mesure ‘’pour une meilleure prise en charge des besoins’’ des travailleurs de l’ISRA.
Les travailleurs, ‘’d’une seule voix, se tournent à nouveau vers vous en dernier recours, au regard des enjeux et en prévision des conséquences sur notre agriculture et le développement de notre pays, pour réclamer la sécurisation de nos salaires et l’augmentation substantielle de la part de l’Etat dans le budget de l’ISRA’’, lit-on dans la lettre ouverte au chef de l’Etat.
La correspondance a été signée par les secrétaires généraux des trois centrales réunies au sein de l’intersyndicale des travailleurs de l’ISRA, le Syndicat autonome de la recherche agricole et agroalimentaire, le Syndicat national des travailleurs de l’agriculture et le Syndicat national de la recherche scientifique, technique et agricole.
La lettre adressée au président de la République, dont l’APS a obtenu une copie, a été écrite après une ‘’première lettre ouverte en novembre 2018’’, qui est ‘’restée sans suite’’. Celle-là avait été consacrée à ‘’la difficile situation de ce maillon important de la chaîne de valeur agricole du Sénégal’’, qui peut pourtant se prévaloir de de ses résultats ‘’dans le développement de l’agriculture sénégalaise au sens large, particulièrement dans l’intensification des productions agricoles pour une atteinte de la souveraineté alimentaire’’.
‘’Cet institut, qui, pour le financement de recherches contribuant au PSE (Plan Sénégal émergent), se rabat sur diverses conventions négociées par les chercheurs, au gré des priorités des bailleurs, se ‘substituant’ ainsi à l’Etat avec beaucoup de peine, continue à disposer depuis plus d’une décennie d’un faible budget annuel de 4,5 milliards’’ de francs CFA, déplorent les auteurs de la lettre.
‘’Pire, ajoutent-ils, ce faible budget qui permet à peine de faire face aux charges de fonctionnement (45%)’’, a fait l’objet de ‘’nombreuses ponctions depuis 2017 (1 milliard 475 millions francs FCFA), jusqu’à la dernière en 2020 (400 millions), qui ont fini par plomber le règlement des salaires à temps, ainsi que d’autres charges de fonctionnement (prise en charge sanitaire, électricité, eau, téléphone, les charges fiscales et sociales, etc.) depuis plusieurs mois’’.
Dans ce contexte, la nomination, en novembre dernier, d’un nouveau directeur général ‘’dont les compétences et l’engagement pour l’institut sont largement partagés par le personnel’’, dénote de la volonté des pouvoirs publics ‘’de faire de l’ISRA un institut de recherche de pointe, au service du développement agricole [du] Sénégal’’, affirment les syndicalistes.
Ils constatent que cette volonté est également partagée par leur ministre de tutelle, Moussa Baldé, qui est ‘’resté sensible à la situation de l’ISRA depuis son arrivée, en proposant des assises’’ consacrées à l’institut de recherche.
Mais ‘’pour permettre au nouveau directeur général d’amorcer avec efficacité le virage de la performance, l’ISRA doit être mieux accompagné par l’Etat’’, ajoute l’intersyndicale.
Ses leaders estiment que ‘’la difficile situation budgétaire de l’ISRA ne facilite pas à son directeur général, malgré toute sa bonne volonté et son envie de rehausser le blason de la recherche agricole, la réussite de sa mission’’.
‘’Ainsi, l’espoir suscité auprès du personnel par le choix du nouveau directeur général risque de s’effriter au vu des retards de salaires (ceux de novembre n’ont pas encore perçus à la date du 12 décembre !) et leurs conséquences sociales (renvoi des enfants de l’école, coupures d’eau, de téléphone et d’électricité…), à la non-prise en charge médicale du personnel et de leurs familles’’, avertit l’intersyndicale des travailleurs de l’ISRA.
Or, estime-t-elle, ‘’la pandémie de Covid-19 vient de nous donner une leçon universelle, qui est de renforcer notre autonomisation pour la sécurité alimentaire’’ et ‘’la recherche agricole publique, pour la promotion d’innovations découlant sur des systèmes alimentaires agroécologiques et résilients’’.
Pour ce faire, ils demandent que le budget de l’ISRA, structurellement ‘’plafonné à 4,5 milliards francs CFA depuis plus d’une décennie’’, soit ‘’substantiellement revu à la hausse pour lui permettre de faire face à toutes ses missions’’.
Les ‘’moyens réduits’’ de l’ISRA ‘’sont à la base de son faible effectif (composé uniquement d’une centaine de chercheurs), à l’impossibilité de prendre correctement en charge des pans importants comme la recherche stratégique publique, surtout dans certaines zones du Sénégal’’, lit-on dans la lettre.
‘’Cette difficulté se manifeste davantage avec la lente agonie de plusieurs centres de l’ISRA situés à l’intérieur du pays, qui ne favorise pas l’accompagnement de la territorialisation des politiques publiques par la recherche agricole. A terme, c’est l’atteinte des objectifs de la sécurité alimentaire qui est foncièrement remise en cause’’, préviennent les syndicalistes.
Aussi ‘’les ponctions du budget de l’ISRA doivent cesser’’, écrivent-ils, ajoutant : ‘’Ce budget, faut-il le répéter, est majoritairement constitué de financements de bailleurs qui ne prennent pas en charge les salaires des chercheurs. Toute ponction serait ainsi ressentie sur les salaires du personnel, le fonctionnement de manière générale’’.

Des chercheurs de l’ISRA démarrent l’école d’hivernage, une session de partage de résultats et de visites sur le terrain

Une quarantaine de chercheurs de l’Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA) de Bambey et Thiès ont démarré, dimanche, dans la capitale du rail, leur rencontre annuelle de partage des résultats de leurs recherches, avec leurs partenaires techniques et financiers, ainsi qu’avec les producteurs, qui sera couplée à une tournée de terrain dans plusieurs localités du pays.
Quarante chercheurs et une dizaine de membres du personnel d’appui des centres de l’ISRA de Bambey et Thiès prennent part à cette rencontre, qui se tient au CERAAS, situé dans l’enceinte de l’Ecole nationale supérieure d’agriculture (ENSA) de Thiès. Les chercheurs du Centre national de recherche agricole (CNRA) et de l’Unité de production semencière, deux structures basées à Bambey, se sont joints à leurs collègues du CERAAS de Thiès.

Ces journées dites de pré-programmation, un rendez-vous annuel de la recherche agricole qui se tient d’habitude sur une journée, durera six jours, cette fois-ci. Soit jusqu’à vendredi. La rencontre est encore appelée ‘’Ecole d’hivernage’’ sous sa nouvelle forme qu’elle prend pour la première fois.

Outre les présentations des résultats de la recherche, les ingénieurs agronomes feront une tournée auprès des producteurs pour voir si les technologies qu’ils ont développées sont utilisées par les paysans. Ce périple les mènera en milieu paysan et dans des stations de recherche de Thiès, Bambey, Nioro, Kolda, Séfa, Tambacounda, Kaffrine et Kaolack.

Ces visites de terrain devront les aider à déterminer les raisons de l’utilisation ou de la non-utilisation des produits de leurs innovations, a expliqué Ndjido Ardo Kane, directeur du CERAAS, lors d’une visite de champ démonstration. Selon lui, ce sont des moments d’évaluations qui leur permettront de ‘’voir si la recherche a répondu à leurs préoccupations’’ mais aussi de recueillir auprès d’eux ‘’de nouveaux besoins que la recherche devra adresser’’.

Le Centre d’étude régional pour l’amélioration de l’adaptation à la sécheresse (CERAAS) est identifié par la CEDEAO comme un ‘’centre régional d’excellence’’ pour la recherche, concernant six chaînes de valeur que sont le mil, le fonio, le sorgho, auxquelles s’ajoutent l’arachide, le niébé et le soja, a dit son directeur, Ndjido Kane.

Vu sa dimension sous-régionale, ce centre prend en compte les préoccupations nationales des agriculteurs sénégalais, tout en partageant les innovations développées avec la sous-région.

La pré-programmation, première phase du cycle d’activités de l’ISRA, est suivie de l’étape de la programmation, où tous les chercheurs se réunissent pour faire leurs prévisions de recherches de l’année prochaine, explique M. Kane. A la fin de l’année, le conseil scientifique et technique (CST) recourt à des consultants pour évaluer les résultats de leurs recherches. Des rapports sont produits et envoyés au ministère de l’Agriculture et l’Equipement rural.

Cette première édition de l’Ecole d’hivernage devrait aider à une ‘’meilleure structuration des programmes de recherche’’ du CNRA et du CERAAS, en adéquation avec le Plan stratégique de développement 2018-2022 de l’ISRA et du statut de centre régional de référence du CERAAS, notent les organisateurs.